Résilier un bail pour travaux : démarches et conditions légales à connaître

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Salon bien éclairé avec cartons et avis d'expulsion

La loi autorise le propriétaire à donner congé au locataire pour réaliser certains travaux, mais ce droit reste strictement encadré. Toute résiliation de bail pour cause de travaux doit répondre à des conditions précises, sous peine d’être frappée de nullité.

Des décisions de justice récentes rappellent que le motif ne suffit pas : la procédure doit respecter des délais et des formes spécifiques, au risque d’entraîner la réintégration du locataire ou des sanctions. Les obligations du bailleur et les droits du locataire s’articulent autour d’un équilibre établi par le législateur et régulièrement précisé par la jurisprudence.

Résiliation d’un bail pour travaux : une possibilité encadrée par la loi

Mettre un terme à un bail pour réaliser des travaux ne s’improvise pas. C’est un acte encadré, balisé par la loi du 6 juillet 1989 qui fixe les contours des congés pour travaux dans les locations d’habitation. Le propriétaire ne peut agir que dans certains cas bien définis. Autrement dit, il ne s’agit pas d’un prétexte pour se séparer d’un locataire à la légère. Seuls les travaux majeurs, ceux qui rendent le maintien dans le logement impossible, ouvrent cette possibilité. Il peut s’agir d’une surélévation, d’une transformation profonde ou d’un changement d’affectation de l’immeuble. Un simple rafraîchissement ou une modernisation légère ne suffisent pas.

Pour que la démarche tienne la route, il ne suffit pas d’invoquer le besoin de travaux. Le propriétaire doit expliquer, preuves à l’appui, pourquoi la libération des lieux s’impose. À la notification du congé, il doit joindre tous les documents nécessaires : plans détaillés, permis de construire, déclaration de travaux, et, si besoin, autorisation de la copropriété. Omettre ne serait-ce qu’un de ces éléments, c’est prendre le risque de voir le congé contesté, voire totalement annulé.

Les logements soumis à la loi de 1948 relèvent de règles encore plus strictes. Ces biens anciens bénéficient d’un régime protecteur pour certains locataires : âge, niveau de ressources ou situation familiale leur confèrent des droits renforcés. Parfois, le propriétaire doit même s’engager à proposer un relogement avant de pouvoir donner congé. Ignorer ces protections expose à de sérieux revers.

Voici les points à retenir sur ce volet :

  • Résiliation du bail pour travaux : réservée aux opérations majeures, à justifier rigoureusement.
  • Bailleur : obligation de suivre la procédure, fournir tous les justificatifs demandés.
  • Locataire : droit d’être informé, de contester, et, sous certaines conditions, de bénéficier d’un relogement.

Dans quels cas le bailleur peut-il mettre fin au bail pour réaliser des travaux ?

Un bailleur ne peut pas mettre fin à un bail pour n’importe quel chantier. La loi liste précisément les situations où le congé pour travaux est permis. Seuls les travaux lourds justifient la libération du logement : transformation radicale, reconstruction, changement d’usage. Changer la moquette ou rénover une salle de bain n’entre pas dans ce cadre. Il faut s’attaquer à la structure même de l’immeuble, ou envisager une réaffectation totale des lieux, pour que le motif soit considéré comme sérieux et légitime.

Avant d’aller plus loin, le propriétaire doit monter un dossier solide. Le projet doit être détaillé, documenté, et accompagné de toutes les pièces nécessaires : plans, autorisations, permis de construire, et, si la copropriété est concernée, son accord. Sans ces preuves, le locataire est en droit de contester la décision devant les tribunaux, et les juges ne font pas de cadeau sur ce point.

La protection du locataire protégé reste l’un des piliers du dispositif. Âge, ressources ou charges de famille peuvent conférer à certains locataires une protection supplémentaire, qui oblige le bailleur à proposer une solution de relogement adaptée avant toute rupture de bail. La loi veille, ici encore, à éviter les abus et à garantir une certaine équité dans la relation locative.

Pour résumer, voici ce que la loi exige dans ces situations :

  • Travaux éligibles : transformation, reconstruction, réhabilitation intégrale.
  • Justificatifs : plans, permis, projet détaillé, autorisation éventuelle de la copropriété.
  • Protection du locataire : solution de relogement obligatoire pour les titulaires du statut protégé.

Procédures à suivre et obligations légales pour une résiliation conforme

Le respect de la procédure fait toute la différence. Pour mettre un terme à un bail pour travaux, le bailleur doit suivre à la lettre le protocole fixé par la loi du 6 juillet 1989. Tout commence par la rédaction d’une lettre de congé en bonne et due forme, précisant la nature et l’ampleur des travaux envisagés. Ce courrier doit être envoyé en recommandé avec accusé de réception, ou remis par un commissaire de justice.

Il est impératif que chaque signataire du bail reçoive individuellement la notification. Depuis 2015, une notice d’information accompagne obligatoirement le congé : elle rappelle les droits et devoirs du locataire. Oublier ce document peut entraîner la nullité pure et simple du congé.

Le délai de préavis impose son rythme : six mois pour une location vide, trois mois pour un meublé. Ce délai commence à la date de réception de la lettre par le locataire. Le courrier doit mentionner sans ambiguïté le motif lié aux travaux, décrire le logement concerné, et, s’il y a lieu, exposer les grandes lignes du projet.

Dans certaines circonstances, des démarches supplémentaires s’imposent. Si le locataire détient le statut de locataire protégé, la proposition d’un relogement devient incontournable. Par ailleurs, si le locataire entreprend des travaux sans autorisation, une clause résolutoire peut permettre au bailleur de demander la résiliation anticipée du contrat, sous réserve d’un jugement favorable.

Bailleur et locataire discutant autour d

Jurisprudence et exemples concrets : comment les tribunaux interprètent les litiges liés aux travaux

La jurisprudence ajuste régulièrement la lecture des textes concernant la résiliation du bail pour travaux. Les juges examinent de près la rigueur de la procédure, la motivation du congé et la réalité des travaux annoncés. Un congé envoyé sans motif précis, ou sans la notice d’information ? Les décisions de 2025 le confirment : la nullité tombe, le bailleur se retrouve souvent contraint de réintégrer le locataire ou de lui verser des indemnisations pour préjudice subi.

Sur le terrain, les exemples abondent. En 2024, la chambre civile de la Cour d’appel de Versailles a annulé un congé pour travaux car la lettre manquait de précisions sur le projet et le calendrier. À l’opposé, un propriétaire ayant constitué un dossier complet, permis de construire, plans détaillés, déclaration préalable, a obtenu gain de cause, même face à un locataire protégé, à condition de lui proposer un relogement adapté.

Pour mieux comprendre les tendances récentes, voici quelques situations fréquemment jugées :

  • Procédure irrégulière : annulation du congé, maintien du contrat, et parfois l’octroi de dommages et intérêts au locataire.
  • Travaux non autorisés par le locataire : résiliation judiciaire, obligation de remettre en état, voire expulsion. L’affaire Vallée Sud Habitat en est une illustration marquante.

Les juges accordent une attention particulière à la bonne foi du bailleur, mais aussi à la consistance réelle du projet. Il n’est pas exigé de prouver que les travaux sont « indispensables », mais leur réalité et leur ampleur doivent être établies. Les litiges restent fréquents, et chaque affaire se joue sur le respect minutieux des droits et obligations des deux parties.

Résilier un bail pour travaux, ce n’est jamais un simple acte administratif : c’est une démarche qui engage, expose, et dont la moindre faille peut bouleverser l’équilibre entre bailleur et locataire. À chacun de jouer sa partition, sous l’œil vigilant du juge, car, en matière de congé pour travaux, rien n’est jamais acquis d’avance.